Paul Friésé (1851-1917)
Issu de l’école nationale supérieure des Beaux-Arts (ENSBA), Paul Friésé est connu pour ses bâtiments industriels et commerciaux. Doté d’une double compétence d’ingénieur et d’architecte, il les met toutes les deux au service de ses réalisations industrielles . A partir de 1891 il réalise des commerces, immeubles de rapport et de nombreux bâtiments industriels notamment dans l’Essonne (grands moulins de Corbeil). A partir de 1903 il travaille particulièrement pour la compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris qui l’engage dans la construction de sous-stations électriques nécessaires à l’alimentation en électricité du métro parisien.
Dès l’ouverture du canal St Martin, au début du XIX ème siècle, des activités industrielles s’implantent au bord du canal. En 1889 l’électrification de la capitale est confiée à 6 sociétés concessionnaires. La compagnie parisienne de l’air comprimé est l’une des plus importantes et couvre les quartiers au nord-est et au centre de Paris. A cette date l’énergie électrique ne pouvait être transportée sur de longues distances, imposant la construction d’usines dans les quartiers d’habitation. L’implantation au bord du canal, dans une zone éloignée des travaux haussmanniens, facilite l’approvisionnement en charbon par péniches et en eau pour la condensation des machines à vapeur. En 1900, 300 ouvriers travaillaient dans cette usine, considérée comme la plus importante et la plus moderne usine d’électricité de France, ce qui lui vaudra la médaille d’or de l’exposition universelle de Paris la même année.
D’un point de vue constructif, Friésé doit composer avec un terrain exigu, perpendiculaire par rapport au canal, ce qui le contraindra à réaliser un bâtiment en U et surtout tout en hauteur, superposant audacieusement les machines à vapeur au-dessus des générateurs électriques , les combles abritant les silos à charbons et les réservoirs d’eau. Les cheminées ont disparu. Sur le quai, les façades accolées des bâtiments administratifs et des salles des accumulateurs se marient harmonieusement tout en affichant leurs fonctions respectives. A l’arrière, le vaste vaisseau qui abritait autrefois la chaufferie et la salle des machines se singularise par l’élégant dessin que forment les poutrelles métalliques. En combinant avec talent exigences techniques et recherches esthétiques, Paul Friésé réussit ici un superbe exemple de rationalisme constructif achevé en 1895.
La centrale électrique du quai de Jemmapes est un magnifique exemple de l’architecture métallique à la mode à la fin du XIX ème siècle. Le bâtiment est à charpente métallique porteuse, hourdé de briques rouges et jaunes. Cette architecture industrielle réunit l’art de l’architecture et la science de l’ingénieur inspiré par la théorie de Violet-le-Duc. Ce procédé est celui du célèbre bâtiment contemporain du moulin de la chocolaterie Menier à Noisiel.
La situation intra-muros de la centrale et les progrès en matière de la maitrise de la fée électricité vont rapidement condamner l’usine; dès la fin de la grande guerre son déclin est enclenché. Des centrales plus modernes s’installèrent en périphérie de la capitale. Désaffectée en 1928, l’ancienne usine électrique va abriter tour à tour un dépôt de presse, une usine à vêtements, un atelier de meubles avant d’être repris par la société Clairefontaine qui y fabrique toujours agendas et registres. En conclusion, il est plaisant de constater que ce magnifique témoignage du patrimoine industriel parisien est encore en service…
Bâtiment ISMH depuis 1992 en tant que patrimoine industriel.
L’ancien usine électrique est à retrouver dans la visite » Au fil de l’eau, le canal St Martin »