André Arfvidson (1870-1932)
Diplômé de l’école Nationale Supérieure des Beaux-Arts (NSBA) en 1892, Arfvidson fait parti des architectes qui très tôt, dès 1910, ont annoncé le mouvement moderne (alors que s’éteignait déjà le mouvement Art Nouveau).
L‘immeuble de la rue campagne première en est la parfaite illustration.
Arfvidson réalisera un grand nombre d’ HBM avec parfois la collaboration de l’architecte J. Bassompierre, dans le 13 ème, le 16 ème et le 17 ème arrondissement.
Il va définir le modèle de l’immeuble pour artistes au 31 et 31 bis rue campagne première dans le quartier de Montparnasse. Cet immeuble, achevé en 1911 et primé au concours des façades de la ville de Paris, compte parmi les plus belles façades de la capitale. Issu de la révolution du béton, l’immeuble est une oeuvre de transition. En effet l’élégance de l’habillage de carrelage de grès flammé et la recherche de l’effet décoratif ainsi que la vivacité des couleurs qui mettent l’art dans la rue relèvent de l’esthétisme de l’Art Nouveau. Mais nous sommes loin des prouesses sculpturales des premiers immeubles Art Nouveau de Hector Guimard ou de Jules Lavirotte. Cet immeuble est à la fois spectaculaire mais strictement fonctionnel et marque une étape dans le dépouillement progressif des façades en céramique.
Ici Alexandre Bigot, l’un des plus grands céramistes et artiste incontournable de la fin de XIX ème siècle et du début du XX ème siècle, spécialiste des céramiques architecturales a travaillé avec les plus grands architectes du moment; il nous livre ici un éventail d’éléments en grès flammé produits en grande série (pastilles injectées dans le ciment, carreaux moulés, cabochons, rosaces…) Seules les
impostes des deux entrées principales font l’objet d’un traitement particulier : un gracieux visage féminin surmonte l’oeil de boeuf pris dans une guirlande de roses.
Oeuvre de transition donc, par son décor simplifié mais aussi par son volume, ses formes qui annoncent le Mouvement Moderne; Arvidson superpose 4 niveaux d’ateliers qu’il répartit sur 5 travées le long de la rue créant ainsi 20 ateliers d’artistes. Les grandes baies vitrées et les appartements en duplex annoncent les volumes spacieux du Mouvement Moderne et la mode de l’atelier d’artiste des années 20 et 30 des architectes comme Le Corbusier ou Mallet-Stevens. La structure est en béton armé, matériau moderne, fer de lance du mouvement international mais ce béton est cependant habillé de carrelage car, Arfvidson comme les bâtisseurs d’alors, ont encore des doutes sur l’étanchéité du béton brut et sa capacité à bien vieillir…
Pourvu d’un grand confort (gaz,chauffage central, électricité, téléphone, ascenseur cet immeuble abrita des artistes confirmés et fortunés. Parmi les nombreuses personnalités qui ont habité dans l’immeuble, comme le poète et musicien américain Ezra Pound, citons le plus célèbre d’entre eux, le peintre, photographe et réalisateur Man Ray du mouvement des Surréalistes. Il habita l’immeuble de 1920 à 1930 en compagnie de sa compagne et modèle la célèbre Kiki de Montparnasse. C’est ici qu’il réalisera ses premières solarisations dans la salle de bain transformée en chambre noire.
Immeuble inscrit ISMH en 1986
Ce chef d’oeuvre est à découvrir dans la visite « les ateliers et demeures d’artistes à Montparnasse »